
Le « proto », des cas d’intoxication toujours en augmentation
Depuis 2020, les signalements d’intoxications liées à l’usage détourné du protoxyde d’azote, ou « proto », sont en hausse continue. Ce gaz dit « hilarant » peut entraîner une dépendance ainsi que des complications sévères, parfois irréversibles, sur le système nerveux et le système cardiovasculaire (cœur et vaisseaux) en cas de prises répétées et/ou en grande quantité. Le protoxyde d’azote est majoritairement consommé par des adolescents et des jeunes adultes : d’après les données du Baromètre de Santé publique France, en 2022 14 % des 18-24 ans l’avaient déjà expérimenté et plus de 3 % déclaraient en avoir consommé au cours de l’année. Ces jeunes usagers n’ont pas tous connaissance de ses dangers. Face à cet enjeu de santé publique, l’ANSM, l’Anses et Santé publique France rappellent les mesures de prévention et de prise en charge des dommages associés à la consommation de protoxyde d’azote.
Entre 2019 et 2020, l’Anses avait mis en évidence une augmentation inquiétante des intoxications en lien avec la consommation détournée de cartouches de protoxyde d’azote chez les jeunes. Ces données avaient contribué à la loi de 2021 sur la prévention des usages dangereux du protoxyde l’azote.
Depuis 2013, l’ANSM surveille cet usage détourné du protoxyde d’azote non médical au moyen d’une enquête d’addictovigilance. Menée par les centres d'évaluation et d'information sur la pharmacodépendance-addictovigilance (CEIP-A), cette enquête est complétée par l’analyse des données des centres antipoison et de toxicovigilance (CAP-TV).
En 2023, 472 signalements liés à la consommation de protoxyde d’azote ont été enregistrés par les CEIP-A, soit 30 % de plus qu’en 2022. Les CAP-TV ont reçu 305 signalements, soit 20 % de plus qu’en 2022. Ces chiffres confirment l’augmentation du nombre de cas déclarés de complications associées au protoxyde d’azote observés ces dernières années. Nous notons que la part des signalements concernant des femmes augmente.
Ces signalements montrent également une augmentation des cas liés à un usage répété et prolongé (plus d’un an) du protoxyde d’azote. Parmi ces signalements d'abus, d'usage détourné et de dépendance, 92 % font état d’une consommation de doses élevées et de l’utilisation de bonbonnes de grand volume. 50 % d’entre eux relatent une consommation quotidienne.
Les cas d'abus, d'usage détourné et de dépendance sont rarement associés à la consommation d’autres substances.
Le 16 mars 2023, l’agence européenne des produits chimiques (ECHA) a classé cette substance comme toxique pour la reproduction de catégorie 1B sur proposition de l’Anses, première étape vers une réglementation de niveau européen.
En 2023, pour la première fois, les CEIP-A et CAPTV ont reçu les signalements de deux nouveau-nés présentant des troubles neurologiques à la naissance dans un contexte d’usage détourné et répété du protoxyde d’azote par la maman pendant la grossesse. Nous alertons particulièrement les femmes enceintes et en âge de procréer sur les risques potentiellement graves pour l’enfant à naitre d’une exposition importante au protoxyde d’azote pendant la grossesse.
Risques pour la santé
Lorsque la consommation de protoxyde d’azote est répétée et à intervalles rapprochés et / ou à fortes doses, elle peut entraîner des complications graves, confirmées par les dernières données issues des réseaux des CEIP-A et CAP-TV :
- Des troubles de l’usage (perte de contrôle de la consommation), dont des cas de dépendance ;
- Des complications neurologiques : troubles sensitifs et/ou moteurs avec des engourdissements, des faiblesses musculaires, voire une perte de la capacité à marcher. Des douleurs nerveuses intenses, des troubles de la coordination et des troubles urinaires (difficulté à contrôler sa vessie voire incontinence urinaire) peuvent également survenir ;
- Des problèmes cardiovasculaires (cœur et vaisseaux sanguins) : formation de caillots sanguins (thromboses), susceptibles de conduire au décès en cas d’embolie pulmonaire ;
- Des symptômes psychiatriques : hallucinations, épisodes délirants, troubles de l’humeur.
Le protoxyde d’azote modifie les sensations et diminue les réflexes. Conduire un véhicule après en avoir consommé, qu’il s’agisse d’une voiture, d’un vélo ou même d’une trottinette, peut être à l’origine d’accidents graves, voire mortels.
Vitamine B12 comme « antidote » au protoxyde d’azote, une fausse bonne idée
Se supplémenter en vitamine B12 n’est pas suffisant pour contrer les effets néfastes du protoxyde d’azote. Si on continue à consommer du protoxyde d’azote, la vitamine B12 sera systématiquement neutralisée et inefficace.
Pour protéger sa santé, la meilleure solution est de ne pas consommer de protoxyde d’azote.
Des solutions existent pour se faire accompagner.
Informations et aide pour les consommateurs et consommatrices de « proto » ou leurs proches
Que faire en cas d’intoxication au protoxyde d’azote ?
Le protoxyde d’azote présente de nombreux dangers pour votre santé. Si, après en avoir consommé, vous ressentez des engourdissements dans les bras et les jambes, une sensation de brûlure ou de décharge électrique, des picotements, une perte du toucher, des difficultés à marcher ou à bouger consultez un professionnel de santé ou contactez votre centre antipoison (01 45 42 59 59).
Si vous ou quelqu’un de votre entourage présente une sensation de malaise, des difficultés à respirer ou des troubles de la conscience, contactez rapidement un numéro d’urgence (urgence médicale au 112, Samu au 15, pompiers au 17).
Si vous êtes enceinte ou souhaitez l’être, ne consommez pas de proto : ce produit pourrait également faire courir des risques à votre futur enfant.
Que faire en cas de dépendance ?
Le « proto » est un produit qui peut rendre dépendant. Si vous (ou l’un de vos proches) avez des difficultés à contrôler et/ou à arrêter votre consommation, parlez-en à votre médecin ou à une structure spécialisée dans la prise en charge des addictions (CSAPA) ou à un centre d'évaluation et d'information sur la pharmacodépendance addictovigilance.
Les consultations jeunes consommateurs (CJC) proposent aux consommateurs de moins de 25 ans et leur entourage un service, gratuit et confidentiel, d’accueil, d’écoute, de conseil et, si nécessaire, une orientation.
En complément, Drogues info service est le service national d’aide à distance en matière de drogues et de dépendances de Santé publique France. Il a une mission d’information, de conseils, de soutien et d’orientation du public (www.drogues-info-service.fr ou au 0 800 23 13 13, 7 jours/7, de 8h à 2h, appel anonyme et gratuit).
Drogue info service :
> Favorise l’accès à une information adaptée à chacun, en s’adressant aux usagers comme à leur entourage avec des espaces qui leurs sont dédiés ;
> contribue à libérer la parole en encourageant les interactions et l’entraide grâce aux modules interactifs (Questions-Réponses, Forums, témoignages, etc.) et au service de chat individuel (espace de dialogue en temps réel entre l’internaute et un professionnel) ;
> facilite l’orientation en proposant un annuaire de plus de 3 000 structures spécialisées en addictologie.
Informations pour les professionnels de santé et du domaine médico-social
Certains signes ou comportements doivent vous alerter sur une potentielle intoxication au protoxyde d’azote : Téléchargez le document d’aide au diagnostic et à la prise en charge d’une intoxication au protoxyde d’azote (mis à jour le 16/04/2025).
Une prise en charge adaptée doit être proposée aux patients avec, dans la mesure du possible, un accompagnement.
En cas de suspicion de consommation importante de protoxyde d’azote avec dépendance, vous devez orienter le patient vers une prise en charge addictologique adaptée, notamment via l’équipe de liaison et de soins en addictologie (ELSA) en cas d’hospitalisation.
N’hésitez pas à contacter votre centre d'évaluation et d'information sur la pharmacodépendance addictovigilance ou votre centre antipoison (01 45 42 59 59).