Pesticides

Pesticides et santé : un enjeu prioritaire pour l’Anses

L’Inserm vient de publier le résultat de l’expertise collective « pesticides et santé » qu’elle a réalisée à la demande de la direction générale de la santé (DGS). Le terme « pesticides » couvre, au sens large, l’ensemble des produits de lutte contre les organismes nuisibles, à savoir les produits phytosanitaires (usages agricoles et jardiniers professionnels et amateurs), biocides et certains médicaments (humains ou vétérinaires). Ce travail fournit une synthèse très complète de l’état des connaissances scientifiques sur les liens pouvant être établis entre l’exposition aux pesticides et la survenue d’une pathologie, en les classant selon trois catégories : présomption forte, moyenne et faible, et en précisant le niveau de connaissance des mécanismes d’action. 

Cette expertise constitue une contribution très utile pour l’Anses dans le cadre de son travail d’évaluation des risques liés à l’exposition aux pesticides. Elle conforte les mesures prises depuis une quinzaine d’années dans le cadre de la règlementation européenne de retirer du marché les substances les plus directement suspectées d’effets néfastes pour la santé, et donc désormais interdites en Europe, en particulier les organochlorés (DDT, lindane, chlordécone), mais aussi des organophosphorés (comme le parathion), pyréthrinoïdes (perméthrine, interdit comme produit phytosanitaire) ou encore pyridines (paraquat). Ces mesures couvrent les usages professionnels ou domestiques ainsi que l’impact potentiel sur les résidents et les riverains. L’exposition de ces derniers est aujourd’hui prise en compte dans le cadre de l’évaluation réglementaire des pesticides avant leur mise sur le marché et fait actuellement l’objet d’une révision au niveau européen qui devrait aboutir fin 2013.

Le rapport de l’Inserm met en évidence le besoin de mieux documenter les expositions réelles des travailleurs agricoles aux pesticides. Ce point rejoint le constat fait par l’Anses, qui a décidé, en 2011, la mise en place d’un groupe d’experts pluridisciplinaire dédié, visant à rassembler des données d’exposition des travailleurs agricoles, en lien avec le Comité d’experts spécialisé sur les produits phytopharmaceutiques. Cette expertise, actuellement en cours à l’Agence, inclut notamment les utilisateurs de pesticides ainsi que les personnes amenées à intervenir ultérieurement sur les végétaux ou les matériaux traités. Le résultat de ce travail sera publié fin 2014. Sur cette base, l’Agence proposera, le cas échéant, des évolutions du cadre réglementaire européen d’évaluation des produits phytopharmaceutiques en amont de leur autorisation de mise sur le marché pour mieux prendre en compte les expositions réelles. 

Dans son expertise, l’Inserm recommande également de mieux documenter les niveaux et les sources d’exposition de la population générale aux pesticides dans les différents environnements de vie, en particulier s’agissant du lien entre exposition prénatale et développement de l’enfant. Ces résultats illustrent l’importance de documenter de façon très précise les expositions domestiques, qu’il s’agisse de l’utilisation des pesticides hors cadre professionnel ou des expositions environnementales des riverains à proximité des cultures traitées. Dès cette année, l’Anses lance une grande enquête nationale sur les utilisations domestiques de pesticides auprès de plusieurs milliers de foyers, qui apportera des premières informations en 2014 sur les sources d’exposition à domicile. Elle permettra également d’identifier les substances actives à surveiller prioritairement notamment dans les environnements intérieurs. 

L’Anses partage enfin les recommandations formulées dans l’expertise collective de l’Inserm  de poursuivre les travaux de recherche.

A la demande du Ministère chargé de l’agriculture, l’Anses engage un travail d’expertise visant à évaluer l'impact de ces nouvelles données sur les autorisations nationales existantes.

Pour en savoir plus : L’évaluation réglementaire des pesticides

L'évaluation des produits phytopharmaceutiques, des biocides et des médicaments vétérinaires  avant mise sur le marché, ainsi que la surveillance de leurs résidus dans les aliments et dans l'environnement, sont des impératifs de santé publique et environnementale. 

Ce travail se fait dans un cadre réglementaire, au travers de divers règlements européens dont les dispositions s’imposent aux Etats membres. Cette réglementation détermine très précisément les conditions dans lesquelles les dossiers doivent être soumis par les industriels ainsi que les éléments soumis à évaluation en amont de leur mise sur le marché: la nature des pièces à fournir, la typologie des études à fournir en appui ainsi que la méthodologie d’évaluation mise en œuvre par les agences sanitaires. Cette évaluation se base notamment sur les études demandées aux industriels à l’appui des dossiers de demande d’autorisation, qui sont confrontées aux données scientifiques disponibles dans la littérature. 

Les études à fournir, ainsi que leurs modalités de réalisation (nombres d’animaux, conditions d’exposition, durée, …) sont elles-mêmes définies dans des lignes directrices. De la même manière, les modalités d’évaluation par les agences sanitaires, les étapes à suivre et les éléments décisionnels à examiner sont définis dans des guides communs aux différents états-membres afin d’assurer une évaluation la plus similaire possible entre les états membres. 

En France, c’est l’Anses qui est chargée de cette évaluation des dossiers de demande d’autorisation de mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques. Elle émet un avis pour chaque dossier. C’est ensuite le Ministère chargé de l’Agriculture qui, sur la base cet avis, délivre les autorisations de mise sur le marché.