La détection d’un nouveau virus de la grippe du porc en Chine souligne l’importance de surveiller cette maladie chez le porc
Même s’il présente certaines caractéristiques favorables à la diffusion chez l’homme, le nouveau virus de la grippe détecté en Chine chez le porc ne représente pas un risque immédiat de pandémie pour l’Homme. Son apparition rappelle cependant la nécessité de surveiller l’émergence et la propagation des virus grippaux porcins, afin d’être prêt à développer de nouveaux vaccins si nécessaire. C’est la mission du laboratoire national de référence pour l’influenza (autre nom de la grippe) porcin, hébergé par l ’unité Virologie immunologie porcines du Laboratoire de Ploufragan-Plouzané-Niort, de l’Anses.
L’étude publiée dans la revue PNAS (Proceedings of the National Academy of Sciences) le 29 juin dernier a été relayée par plusieurs médias grand public et a suscité de nombreuses interrogations sur la possibilité d’une pandémie grippale chez l’Homme. Les auteurs y relèvent l’augmentation de la fréquence d’une souche de virus grippal dans les élevages de porcs en Chine. Ce virus a été nommé « G4 reassortant EA H1N1 ». Il a été détecté pour la première fois en 2013, mais sa proportion parmi les souches virales identifiées a augmenté depuis 2016. Il provient d’un réassortiment de gènes issus de plusieurs lignées de virus influenza porcins. La caractéristique qui a alerté les chercheurs est que certains de ses gènes sont issus du virus H1N1pdm, qui a causé une pandémie de grippe chez l’homme en 2009. Ces gènes pourraient faciliter son passage à l’Homme et sa capacité à se transmettre d’humain à humain. Une expérimentation sur des furets, modèle animal utilisé pour étudier la grippe humaine, a montré qu’il pouvait se transmettre d’un animal à l’autre.
Pas de risque immédiat chez l’homme
Toutes les caractéristiques ne sont cependant pas réunies pour que ce virus provoque une pandémie chez l’Homme : tout d’abord, seuls deux cas avérés de contamination de l’Homme par le virus « G4 reassortant EA H1N1 » ont été recensés (en 2016 et 2018). Les deux personnes concernées vivaient à proximité d’élevages et aucune transmission d’Homme à Homme n’a été identifiée autour de ces cas. De plus, le virus n’a été détecté que dans des élevages chinois. Enfin, il ne s’agit pas du premier réassortiment d’un virus influenza porcin avec le virus pandémique H1N1pdm, d’autres exemples ont été identifiés depuis 2010, sans qu’ils ne provoquent de pandémie. La plateforme Épidémiosurveillance en Santé Animale (ESA), à laquelle participe des chercheurs de l’Anses, a publié sur son site une note de lecture qui analyse plus en détail les résultats de cette recherche.
Surveiller la grippe chez le porc
En France, la surveillance des virus influenza chez le porc s’est renforcée depuis la pandémie de 2009. L’unité Virologie immunologie porcines du laboratoire de Ploufragan-Plouzané-Niort de l’Anses est le laboratoire national de référence pour l’influenza porcin. À ce titre, il a plusieurs missions, notamment développer et valider les méthodes permettant d’identifier les sous-types et lignées de virus grippaux. Le laboratoire analyse précisément les caractéristiques de ces virus dépistés par les laboratoires vétérinaires agréés pour la détection des virus influenza A chez le porc. Il assure également une veille sanitaire et conserve des banques d’échantillons, de souches virales et de sérums. Ces missions sont notamment menées en lien avec le réseau national de surveillance des virus influenza porcins, Résavip (lire encadré).
Le laboratoire mène également des recherches pour comprendre l’évolution des virus grippaux, ainsi que les facteurs influençant la sévérité de l’infection chez le porc, notamment en cas de co-infection par d’autres pathogènes. Enfin, l’unité travaille à identifier les caractéristiques virales qui facilitent la transmission des virus de la grippe d’une espèce à l’autre.
Les recommandations pour éviter les transmissions porc-homme
Les personnes qui travaillent au contact des porcs sont plus à risque d’être contaminées par un virus grippal porcin que la population générale. Inversement, elles peuvent transmettre certains virus de la grippe humaine aux animaux. En cas de co-infection, les virus grippaux porcins et humains peuvent échanger des gènes, conduisant parfois à l’émergence d’un virus potentiellement plus infectieux et virulent.
Il est donc recommandé aux professionnels de la filière porcine de respecter des gestes barrières parmi lesquels :
- se doucher et changer de vêtements avant et après contact avec des animaux ;
- porter un masque adapté et s’assurer d’une bonne hygiène des mains si eux-mêmes ou les animaux présentent un syndrome grippal ;
- interdire l’accès aux élevages aux personnes malades de la grippe.
Le réseau Résavip
Le réseau Resavip (réseau national de surveillance des virus influenza A chez le porc) mène une surveillance des virus influenza porcins, qui se base sur la notification des suspicions cliniques de grippe en élevage porcin et l’identification des virus par analyses en laboratoire. Ce type de surveillance permet d’avoir une bonne connaissance des virus influenza porcins présents en France métropolitaine et de leur répartition géographique. Le dispositif a la particularité de surveiller un danger sanitaire non réglementé. Il est coordonné par la Coopération Agricole. Les autres partenaires sont la Direction générale de l'alimentation (DGAl), l’Anses, la Société nationale des groupements techniques vétérinaires (SNGTV), l’Association française des directeurs et cadres des laboratoires vétérinaires publics d’analyses (Adilva) et la Fédération nationale des groupements de défense sanitaire (GDS-France).